Un ouragan dans les Grands Lacs, est-ce possible?

Un ouragan pourrait-il se former au-dessus des Grands Lacs et frapper le Québec? Techniquement, non, mais des perturbations inusitées peuvent tout de même surprendre...


L'apogée de la saison des ouragans dans l'océan Atlantique est atteint au début du mois de septembre. Les perturbations se succèdent dans le bassin, et atteignent parfois les côtes américaines. Ce fut notamment le cas des vestiges de Lee, qui ont frappé les Maritimes.

Plusieurs facteurs permettent la formation des systèmes tropicaux en bonne et due forme : une eau chaude, un faible cisaillement et une humidité ambiante assez élevée. De plus, ce type de dépression voit généralement le jour dans les tropiques, soit près de l'équateur. Par conséquent, un ouragan ne peut pas se former à des latitudes comme celles des Grands Lacs. Il peut cependant arriver que des perturbations tropicales se fraient un chemin, mais une telle situation est plutôt rare, et ne se produit qu'environ deux fois par décennie.

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Toutefois, il est déjà arrivé que des perturbations qui se sont développées en sol canadien aient des caractéristiques tropicales - y compris le fameux œil. La tempête de septembre 1996, affectueusement surnommée le « Hurroncane », en est un bon exemple. Ce dernier n'était pas constitué des vestiges d'une perturbation tropicale, ce qui en fait une anomalie intéressante.

Une dépression hors du commun

Entre le 11 et le 15 septembre, un système a commencé à se développer au-dessus du nord du lac Michigan. Comme il était imbriqué dans une masse d'air anormalement froide, présente dans le centre du Canada, le contraste de température avec l'eau assez chaude des Grands Lacs lui a permis de gagner de la puissance. En effet, l'eau de surface atteint généralement son point le plus chaud au cours de la fin du mois d'août jusqu'à la mi-septembre, après avoir passé l'été à emmagasiner de la chaleur. Il y avait donc de l'instabilité près de la surface et donc, de l'énergie disponible.

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Le contexte atmosphérique était plutôt particulier, dans le sens où une « goutte froide », qu'on appelle aussi « dépression coupée », s'est formée au-dessus des Grands Lacs. Résultat : cela a, en quelque sorte, coupé ce système de la circulation atmosphérique et du courant-jet, lui permettant de stagner sur le lac Huron. Cette quasi-immobilité a contribué à réchauffer son noyau, formant du même coup une circulation cyclonique typique des ouragans. Des vents oscillant entre 60 et 117 km/h, soit le seuil suffisant pour une tempête tropicale, ont également décoiffé les environs.

Autre fait important : le « Hurroncane » possédait deux fronts, ce qui est typique des dépressions qui se développent vers nos latitudes.

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Un look intrigant, mais des impacts modérés

Le système a atteint le maximum de sa puissance le 14 septembre 1996, avant de faiblir graduellement. Une chute des températures, encouragée par le brassage des eaux qui a ramené des eaux plus fraîches des profondeurs vers la surface, n'y est pas étrangère.

Ses conséquences ont été limitées : une centaine de millimètres d'eau se sont accumulés sur certains secteurs côtiers, et de fortes rafales ont secoué les habitants du lac Huron. De hautes vagues ont également été observées sur le lac Érié. Malgré tout, le « Hurroncane » continue de fasciner.

Il n'est pas impossible qu'une telle dépression se forme à nouveau au-dessus des Grands Lacs. Elle pourrait même avoir des effets au Québec. Cela reste un phénomène rarissime.

Sources : National Hurricane Center, 2004 | Miner, Sousounis, Wallman et Mann, 2000


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