Juin 1944 : le sort de l’humanité reposait sur la prévision météo

Fort des leçons apprises lors des débarquements en Afrique du Nord et en Sicile, Eisenhower, commandant en chef des forces alliées lors de la Deuxième Guerre mondiale, sait pertinemment que la météo sera une composante clé de la réussite du débarquement de Normandie. Il compte sur cet élément pour avoir une longueur d’avance sur l'ennemi.


Le 6 juin 1944

James Stagg est le prévisionniste à la tête de l’équipe qui informera Eisenhower sur l’évolution des conditions météorologiques. Son équipe est composée de membres de la Royal Navy, du Met Office britannique et de la United States Air Force. À cette époque, les cartes météo sont tracées à la main. Ces cartes de prévisions sont créées à partir des observations récoltées par les stations météorologiques.

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Décoder les messages

Durant la guerre, ces informations sont relayées par radio et encodées. Les deux camps n’ont donc pas accès aux mêmes données. Les alliés ont accès aux données recueillies en zone libre et les nazis possèdent celles recueillies en zone occupée. Cependant, les alliés ont réussi à décoder les communications des Allemands, ce qui leur donne un net avantage.

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Avantage aux alliés

D’ailleurs, les cartes météo du jour du débarquement, archivées par Météo France, montrent que les Alliés utilisaient des cartes de prévisions qui comprenaient les observations des zones occupées par les nazis. Par contre, les cartes allemandes n’avaient que les données compilées par leurs observateurs. Les alliés possèdent ainsi un grand avantage sur l'ennemi.

Afin de mettre toutes les chances de leur côté pour lancer l’opération Overlord (« Suzerain » en français), nom de code du débarquement de Normandie, les alliés ont besoin de conditions météo clémentes. Ils recherchent une nuit avec une pleine lune, peu de nuages et des vents légers pour permettre aux parachutistes d’atteindre leurs cibles. De plus, la marée doit être basse pour pouvoir distinguer les mines et les obstacles placés sur la plage par les Allemands.

Retarder l'opération

Le 2 juin, l’équipe de météorologues prévoit que le temps ne sera pas optimal avant le 7 juin. Malgré cette nouvelle, l'état-major poursuit les préparatifs en vue du débarquement, prévu pour le 5 juin. Selon les prévisionnistes, si l’opération doit avoir lieu début juin, il faudra qu’elle se produise avant le 7 juin, car on prévoit un front froid qui générera de forts vents sur la Manche. L’équipe de James Stagg suggère alors un plan B. Elle pense que le 19 juin serait approprié, car la marée sera favorable.

Le 4 juin au matin, on prévoit du temps agité pour le lendemain, jour initialement choisi pour le débarquement. Eisenhower décide de retarder l’opération Overlord. Cependant, le 4 juin au soir, les prévisions ont changé. On prévoit maintenant une amélioration du temps pour le 5 juin en après-midi. Eisenhower tranche et choisit le 6 juin pour le débarquement. L’opération devra être un succès, car la météo va se détériorer le 7 juin avec le passage d’un vigoureux front froid.

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À l’aube du 6 juin, les côtes françaises sont en vue de l’armada alliée.. Il fait 18 degrés et il n’y a que quelques bancs de stratus dans le ciel. À 5 h les vents tombent complètement et le ciel se couvre de nuages de bas niveau. L'assaut est lancé. Il faut faire vite. Dès 11 h les vents s'intensifient à nouveau, mais il est trop tard, l’opération Overlord est déjà bien entamée. Soufflant du nord-ouest, ceux-ci ont généré des vagues, qui ont rendu difficile l’établissement de la tête de pont sur la partie est des plages de Normandie.

Du côté allemand, on s’attend depuis longtemps à une opération d’envergure de la part des Alliés. Cependant, les nazis ne possèdent pas d’informations météo aussi complètes que les forces d’Eisenhower. Ils sont convaincus qu’une telle opération ne peut avoir lieu avant le 8 ou le 9 juin, car le temps n’est pas assez clément. Certain que rien ne peut arriver avant ces dates, le maréchal Rommel va même se rendre à Paris pour célébrer l’anniversaire de sa femme. De plus, les Allemands évaluent qu’il faut aux Alliés au moins six jours de beaux temps pour réussir une opération d’une telle envergure. La surprise sera complète.

C’est une chance qu’Eisenhower ait choisi de lancer l’opération Overlord le 6 juin, car le plan B de l’équipe de prévisionnistes aurait eu des conséquences catastrophiques. En effet, le 19 juin, une des tempêtes les plus violentes du siècle a frappé la Manche. Elle aurait sûrement causé aux alliés de lourdes pertes. Il est évident que le coup de pouce donné aux alliés par la météo a été un tournant important de la Deuxième Guerre mondiale.

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